Nous y voilà à ce fameux quart contre les anglais. C'était attendu et pourtant on ne peut pas dire que cette première phase ait été sans surprises! Jusqu' à la défaite des bleus face au Tonga qui, sans la défaite surprise de ces mêmes Tongiens contre le Canada, n'aurait pas manqué de nous remettre dans l'avion.
Je me suis levé samedi pour voir ça. Je dois avouer que je n'avais pas d'avis , tant mon oeil bienveillant sur les bleus et un certaine sympathie pour le personnage Lièvremont avaient été déroutés par cette première phase . J'entendais bien les commentaires qui nous prédisaient la montée en puissance, un match plein et abouti et je l'espérais sûrement mais je n'arrivais pas à y croire vraiment. J'étais détaché, sans passion. Pourtant , j'ai rêvé dans la nuit de ce match, sans pouvoir en tirer un pronostic, je vous rassure mais ça ne se passait ... pas très bien.
Donc quand j'ai vu le féroce combat des premières minutes, quand les français ne se sortaient pas encore, je suis resté froid. Et comme la semaine précédente , ça a commencé à " piquer " sérieux après un quart d'heure. Et rebelote, on a commencé à se sortir, mais eux , ils jouaient leur dernier match, ne tablaient que sur la victoire et comptaient bien s'en mettre une belle avant de rentrer à la maison. Avec le recul , on peut se réjouir qu'ils n'aient pas imaginé une seconde pouvoir se qualifier avec 4 essais car s'ils avaient joué ça, je ne sais pas si on aurait pu faire autre chose que compter sur leur maladresse.
A noter le match énorme de Médart qui en plus d'être le seul français capable de franchir la ligne d'avantage à réalisé plusieurs miracles défensifs.
La suite est connue, et la France est ...qualifiée! Et dans un tableau européen en prime! Et face au moins convaincant de cette première phase après nous! Pourtant , en l'état actuel des choses, nous sommes les outsiders face à chacune de ces équipes.
Nous voici dans une situation pittoresque tout de même! Avec encore devant nous de quoi réaliser un exploit ou un gâchis total!
Parlons un peu de Lièvremont. Ses interventions de la soirée et la conférence de presse du dimanche ont montré à la fois un changement dans l'attitude et une certaine constance. Le changement, c'est qu'il évoque un échec personnel sans le démentir et semble considérer que cet échec est acté. C'est aussi ce que je pense. On l'a vu venir et il est là! confirmé. Marc Lièvremont a échoué en équipe de France et la plus improbable des victoires des bleus dans les semaines à venir n'y changerait rien.
En même temps il ne change pas. Il reste le gars droit , au service de son collectif, malgré l'échec et je trouve cela assez digne. Il ne change pas non plus de méthode (si il en a une) face à la presse, aucune langue de bois, comme quand il évoque sa déception de la soirée d'après-match et quand il utilise de façon risquée la provocation dans la presse pour forcer la réaction de ses joueurs. Là, je le suis beaucoup moins. Depuis le traumatisme de Rome, et cette conférence de presse hallucinante qui a ébranlé le groupe et l'a privé de joueurs comme Jauzion, Chabal, Poitrenaud.
Là, où je le suis encore moins c'est lorsqu'il se risque à donner dans la comparaison avec le désastre des bleus du foot en Afrique du Sud.
En d'autres termes, il admet son échec et son destin, et se met aussitôt avec ses moyens au service de ses joueurs.
Et les joueurs?
J'ai lu ici ou là qu'il fallait se résoudre à admettre qu'ils n'avaient pas le talent qu'on leur prêtait. Mais ce n'est pas le problème, il est clair que bons ou mauvais, ils n'ont pas encore montré un vrai match de rugby, ils n'ont pas évolué à leur niveau, quelque soit ce niveau d'ailleurs. Le moment n'est plus de se demander à qui la faute. Celle du staff est admise, mais il reste aux joueurs la responsabilité de prendre leur destin en main. Après tout, la situation est alléchante. Les cadres du groupe mais pas seulement, devraient piaffer d'impatience devant ce quart de finale et projeter de se resserrer sur un rugby fondamental, axé sur le combat au sol, l'agressivité défensive et les contres.
Mais me direz-vous pourquoi si tard? Alors que la qualification n'était pas mathématiquement acquise, on aurait du voir cette prise en main par les cadres, cette responsibilisation de chacun, cette envie de combat. Alors pourquoi?
Peut-être en effet parce que le rugby a changé. Je rejoindrai sur ce point l'analyse de Benezech sur son blog. Les joueurs aujourd'hui ont des contrats à gérer, une carrière à mener, et même une image à entretenir. Et pour cela ils sont assistés par des agents, des conseillers tout en étant dans le même temps choyé par la fédération dans leur statut d'international. Si on ajoute à cela le fait que la sélection de lièvremont a lissé l'équipe en enlevant quelques caractères, on peut douter qu'il ne se passe quoi que ce soit du coté des joueurs.
On peut dans cette optique qu'accueillir favorablement l'annonce de cette équipe avec la réintégration de Mas et Harinordoquy dans le XV de départ et la conservation du groupe qui se doit d'etre revanchard. Mas est capitaine de Perpignan, et a vécu plusieurs crises assez violentes avant de mener son club au titre et il a été épargné par ces deux défaites consécutives. C'est certes un "taiseux" mais s'il mettait son pilier au supplice, il susciterait forcément une réaction de solidarité de tous ses coéquipiers. Harinordoquy remplaçant à un poste qu'il aime moins que le 8, est rentré dans le rang et s'est correctement plié à la discipline du groupe, un bon gars, quoi. Qui pourrait le lui reprocher? Il sera titulaire et, on peut espérer qu'il se montre à son meilleur niveau.
En conclusion, je dirai que l'essentiel est préservé. La possibilité d'une révolte collective qui ne suffira pas pour gagner la coupe du monde mais sauverait l'équipe de France d'un gâchis insupportable pour ceux dont je fais partie qui aiment ce sport pour ses valeurs plus que pour le spectacle qu'il propose. Aux joueurs de saisir leur chance de nous montrer courage, solidarité, humilité, agressivité et peut-être cela fera éclore un peu de d'inspiration, de vista, de talent ( je les échangerai contre une victoire au couteau). Nous n'avons aujourd'hui vu ni les unes, ni les autres.